Une
agriculture
pour nourrir le monde

Aujourd’hui, 1 personne sur 9 s’endort le ventre vide. En 2050, il y aura 2,22 milliards de bouches supplémentaires à nourrir. Un défi impossible ? Non !
Depuis des siècles, l’agriculture familiale produit une partie importante de notre alimentation et fait vivre des millions de familles dans le monde.
Voyage au cœur d’une agriculture qui pourrait relever les grands défis de demain.

Boîte à outils

Les outils de SOS Faim

 

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D’autres acteurs qui parlent d’agriculture familiale

  • AFD (Agence française de développement) campagne sur l’agriculture familiale
  • Agropolis International revue Les dossiers d’Agropolis International « Agricultures familiales »
  • Année internationale de l’agriculture familiale site de campagne
  • AVSF (Agronomes et vétérinaires sans frontière) infographie
  • CFSI (Comité français pour la solidarité internationale) revue Alternatives économiques « Agriculture familiale, le défi »
  • CIRAD (La recherche agronomique pour le développement) campagne 2014 : publications, brochure grand public, exposition, etc.
  • Coordination SUD (Solidarité Urgence Développement) publication « Défendre les agricultures familiales. Lesquelles ? Pourquoi ?
  • FAO (Organisation de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture) page consacrée à l’année internationale de l’agriculture familiale
  • Forum rural mondial articles variés
  • IAASTD évaluation internationale des sciences et technologies agricoles pour le développement : résumé du rapport produit en 2008
  • Inter-réseaux Développement rural revue Grain de Sel « Agricultures familiales : de qui et de quoi on parle ? »
  • Olivier de Schutter rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à l’alimentation, rapports officiels
  • Oxfam international publications diverses
  • Oxfam Magasins du Monde (Belgique) étude « L’agriculture paysanne peut nourrir le monde et refroidir la planète »
  • Plateforme et ressources AlimenTerre site pédagogique
  • Via Campesina mouvement paysan international

Zoom Nord : quelques acteurs en Belgique

  • FUGEA Fédération Unie de Groupements d’Eleveurs et d’Agriculteurs
  • FWA Fédération Wallonne de l’Agriculture
  • Le début des Haricots association d’éducation à l’environnement et à l’alimentation durable 
  • Le Sillon belge le magazine pour l’agriculteur
  • MAP Mouvement d’Action Paysanne
  • Nature et Progrès association qui travaille autour de l’alimentation, l’agriculture et le jardinage bio
  • RABAD Réseau des Acteurs Bruxellois pour une Alimentation Durable
  • Réseau des consommateurs responsables association qui accompagne les citoyens à consommer autrement
  • Réseau des GASAP les groupes d’achats solidaires de l’agriculture paysanne à Bruxelles
  • Saveurs paysannes association qui assure le soutien et la promotion de l’agriculture paysanne

Le monde face à
un paradoxe

Zoom sur le Nord : précarité et obésité

Au Nord, les paysans ne sont pas les premières victimes de la faim. Mais la faim continue d’exister malgré l’abondance et la richesse. En Belgique, la dépendance à l’aide alimentaire atteint des records puisqu’elle concerne environ 200.000 personnes actuellement.

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Quant aux paysans, une portion non négligeable d’entre eux (mais qu’il est difficile de chiffrer) vit chez nous dans une forte précarité. Cela s’explique par l’écart entre les investissements consentis (accès au foncier, mécanisation, etc.) et leurs revenus. Les agriculteurs figurent en effet parmi les personnes les plus endettées en Europe, et le nombre de suicides dans ce secteur n’a cessé de croître au cours de ces dernières années.

Au-delà, dans nos régions industrialisées sous l’emprise de l’agro-industrie, le paradoxe est davantage sanitaire qu’agricole : l’obésité tuerait trois fois plus que la malnutrition (diabète, maladies cardiovasculaires, etc.).

Sources : 
- Fédération des services sociaux - http://www.fdss.be 
- FUGEA (Fédération Unie de Groupements d’Éleveurs et d’Agriculteurs), interview réalisée en septembre 2014, www.fugea.be
- Wijngaert Eric, éleveur et producteur dans la province du Hainaut, interview du 24 septembre 2014.
- Wang-Genh Stanislas, L’obésité tue trois fois plus de personnes que la malnutrition à l’échelle du monde, http://www.huffingtonpost.fr, 17 décembre 2012.

L’agriculture familiale,
c’est quoi ?

Avant de comprendre pourquoi la majorité de ceux qui cultivent ont faim, mettons-nous d’accord sur les mots : qu’est-ce que l’agriculture familiale ?

Notre définition

Selon la région, la culture, le milieu, l’agriculture familiale recouvre des réalités différentes. Il n’en existe donc pas de définition universelle. Il serait d’ailleurs plus juste de parler des agricultures familiales. Toutefois, elles présentent ou visent les cinq caractéristiques suivantes, ce qui les différencie d’autres formes d’agriculture.

icon-familiale Structure familiale

C’est une pratique de l’agriculture qui tourne autour de l’organisation familiale. Elle repose essentiellement sur de la main-d’œuvre familiale mais peut mobiliser des membres de la famille éloignée ou de la communauté et même mener à une forme de salariat (temps partiel, saisonniers, etc.). L’activité est considérée comme familiale tant qu’elle tisse un lien fort entre les activités économiques et la structure familiale.

Sa finalité première diffère également des autres formes d’agriculture. L’AF vise la reproduction du groupe familial. Les agriculteurs familiaux s’occupent généralement des terres cultivées par leurs (grands-) parents et participent ainsi à la pérennisation de la famille et son patrimoine.

icon-nourriciere Fonction nourricière

L’AF a pour but premier de répondre aux besoins de subsistance de la famille. Comment ? En produisant de la nourriture ou en vendant une partie de celle-ci. Ce rôle est encore dévolu à la majorité des AF dans les pays du Sud. Par contre, dans les pays industrialisés, l’AF vise surtout à produire pour le marché. Certaines exploitations familiales du Sud, poussées par l’internationalisation du commerce, se sont aussi mises à produire principalement pour le marché (café, cacao, etc.), sans nécessairement abandonner l’agriculture vivrière.

icon-economique Fonction socio-économique

L’AF cherche à mieux valoriser sa production agricole via la transformation (ex : transformer le lait en fromage ou yaourt) et/ou une meilleure commercialisation (ex : en intégrant une coopérative, en organisant des ventes groupées, etc.), de manière à maintenir l’emploi et assurer un revenu satisfaisant à la famille.

icon-environnemental Fonction environnementale

L’AF cherche à maintenir un lien au territoire. Elle a souvent un attachement historique et culturel à la terre. Pour cette raison, l’AF accorde une plus grande attention au respect des ressources naturelles et de la biodiversité. Néanmoins, aujourd’hui, la réalité de terrain ne permet plus de citer les pratiques durables comme une caractéristique incontournable de l’AF.

icon-culturel Fonction culturelle et sociétale

L’AF consiste aussi en un mode de vie et d’organisation de la société qui tient compte des aspects culturels, sociaux, religieux… Ce mode de vie se caractérise, par exemple, par une autonomie de gestion (un minimum de dépendance par rapport à l’extérieur), une flexibilité ou encore une place centrale donnée aux relations humaines. Dans certains pays, elle participe à l’identité culturelle d’un groupe et constitue un véritable patrimoine à préserver.

En résumé, contrairement à ce qu’on pense souvent, l’agriculture familiale, ça n’est donc pas un modèle agricole spécifique ou un mode de production unique. Il s’agit d’un système d’organisation socio-économique et une approche multifonctionnelle de l’activité agricole, au-delà de la simple production de denrées alimentaires.

Sources : 
- CIRAD et AFD, Les agricultures familiales du monde. Définitions, contributions et politiques publiques, Montpellier, 2013.
- Coordination SUD. Solidarité Urgence Développement. « Agriculture et alimentation en question », Les notes de la C2A n°17, avril 2014.
- SOS Faim, « Agricultures familiales : au pluriel ! » in Défis Sud n° 116, janvier 2014, www.sosfaim.be

Évitons les amalgames

Entre agriculture familiale, petits producteurs, agriculture paysanne, agroécologie, exploitation familiale ou encore agriculture durable, il y a de quoi s’y perdre ! Tout comme parmi tous les termes auxquels on les oppose souvent : agriculture chimique, intensive, conventionnelle, agro-business, etc.

Pourtant, ces termes désignent des approches distinctes de l’agriculture, selon le point de vue pris.

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L’agriculture familiale adopte différentes formes selon le contexte, les opportunités et les conditions qui se présentent à elle.

Sur le terrain, les agriculteurs familiaux du Sud adoptent le plus souvent des pratiques paysannes proches de l’agroécologie (diversification et rotation des cultures, non usage d’intrants externes, diversité des espèces, etc.). Ca n’est cependant pas une condition sine qua non : les intrants chimiques sont aujourd’hui prisés dans les campagnes les plus reculées et des producteurs familiaux de cacao ou de café, par exemple, pratiquent largement la monoculture, souvent attribuée aux grandes industries alimentaires. En Europe, la grande majorité des exploitations agricoles sont familiales mais la plupart d’entre elles, contrairement au Sud, utilisent des méthodes pratiquées par l’agrobusiness (produits chimiques, monocultures, marchés internationaux).

Des atouts pour répondre aux
grands enjeux de demain

L’agriculture familiale présente un potentiel immense pour répondre conjointement aux trois grands défis mondiaux actuels : produire suffisamment de nourriture et assurer une vie décente pour tous, tout en respectant les ressources naturelles et la biodiversité.

Préserver l’environnement

Le défi environnemental et climatique

Changement climatique, disparition de la biodiversité, surexploitation des ressources naturelles, les enjeux environnementaux sont au cœur des préoccupations majeures de notre siècle. Si on continue à ce rythme, une étude de la FAO projette d’ici 2050 un réchauffement climatique de 4°C, une perte de 33% de la biodiversité végétale et une augmentation de 160% des gaz à effet de serre ! L’agriculture est directement concernée par ces questions : d’un côté, elle est la première à subir les dégradations de l’environnement et les changements climatiques mais de l’autre côté, les pratiques agricoles intensives sont aussi parmi les plus responsables de ces fléaux.

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La réponse de l’agriculture familiale

L’agriculture familiale à dominance paysanne (c’est-à-dire fondée sur des pratiques agricoles durables) a des avantages indéniables en matière de gestion de l’environnement. Le lien étroit entre les familles et leur territoire se traduit par un plus grand souci de la préservation de l’écosystème. Par la gestion durable des ressources naturelles, cette agriculture préserve le patrimoine culturel et écologique. Elle utilise des techniques et des savoir-faire adaptés à chaque milieu. La très bonne connaissance du terrain des agriculteurs familiaux leur permet de mieux gérer et exploiter leurs territoires. Elle est mieux armée pour s’adapter aux effets des changements climatiques (grâce notamment à l’optimalisation des ressources naturelles) et aux éléments naturels (vents, pluies, etc.). En outre, contrairement à l’agriculture industrielle et intensive, elle émet peu de gaz à effet de serre, grâce à un usage réduit d’intrants chimiques, une production essentiellement manuelle et une commercialisation locale.

L’agriculture familiale paysanne est aujourd’hui la plus apte à porter et réussir la transition agro-écologique indispensable à long terme.

Sources : 
- Coordination SUD. Solidarité Urgence Développement. Défendre les agricultures familiales : lesquelles ? pourquoi ? Résultats des travaux et du séminaire organisé par la Commission Agriculture et Alimentation de Coordination SUD, le 11 décembre 2007.
- Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Les agriculteurs familiaux. Nourrir le monde, préserver la planète, Rome, 2014.
- Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Produire plus avec moins. Guide à l’intention des décideurs sur l’intensification durable de l’agriculture paysanne, Rome, 2011.

Lutter contre la pauvreté

Le défi socio-économique

La terre produit assez pour nourrir l’ensemble de la population mondiale. La faim n’est donc pas liée à un manque de nourriture mais à un problème de pauvreté et d’inégalités.

En 2016, 800 millions de personnes vivaient dans l’extrême pauvreté, essentiellement en zone rurale. Les petits producteurs sont souvent trop pauvres pour acheter les denrées alimentaires qu’ils ne produisent pas. Ainsi, 75% des personnes souffrant de la faim vivent en zone rurale. Il faut donc produire mais aussi améliorer la situation socio-économique des paysans pour sortir de l’engrenage de la pauvreté.

La réponse de l’agriculture familiale

L’agriculture familiale constitue le moteur essentiel du développement économique et social en milieu rural, à condition qu’elle soit soutenue. Elle permet d’assurer un revenu décent aux paysans, génère des emplois et participe ainsi à la dynamisation socio-économique des campagnes.

Générer des revenus

L’agriculture familiale est une activité économique génératrice de revenus pour les familles d’agriculteurs qui bénéficie aussi aux territoires ruraux. Les agriculteurs familiaux apportent une valeur ajoutée à la matière première agricole en la transformant et/ou en la commercialisant. Dans les pays du Sud, l’AF a une fonction première de subsistance mais, bien souvent, une partie des surplus sont vendus sur les marchés locaux, voire même à l’exportation. Par exemple, le cacao et le café que nous consommons sont issus à respectivement 95% et 80% de l’agriculture familiale.

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Par ailleurs, par son ancrage local et ses liens avec de nombreux acteurs, l’agriculture familiale a des retombées positives sur le reste de la société. Elle contribue à l’émergence et au maintien d’une série d’activités non agricoles dans l’espace rural (commerces, services, écoles, etc.), qui n’auraient pas leur place sans l’essor des activités agricoles. On estime qu’1% de croissance du secteur agricole entraine en moyenne 0,6-0,7% de croissance du secteur non agricole.

Créer des emplois

Aujourd’hui, l’agriculture familiale emploie 40% de la population active mondiale, ce qui en fait le premier « employeur » dans le monde. Elle est la seule activité économique capable d’absorber des flux massifs de population de manière durable. En 30 ans, elle a permis la création de 350 millions d’emplois, principalement en Chine, en Inde et sur le continent africain. D’ici 2025, 330 millions de jeunes Africains et 570 millions d’Asiatiques arriveront sur le marché du travail dans les régions les plus pauvres et les plus rurales de la planète.

L’enjeu est majeur : il faut freiner l’exode rural. Sans une redynamisation des campagnes, cet exode se poursuivra, la pauvreté augmentera dans les villes et les migrations se perpétueront, avec des conséquences souvent tragiques.

Favoriser un développement social et culturel

L’agriculture familiale réduit les inégalités et discriminations.

Elle procède à une distribution des richesses plus équitable que dans d’autres formes d’agriculture où les revenus sont concentrés entre quelques mains. Cette répartition plus large et plus égale permet à davantage de familles d’atteindre un niveau de vie décent et d’avoir accès à des soins de santé, une éducation, un logement, la consommation de biens non alimentaires, etc.

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Son mode d’organisation accorde une place à chaque membre de la famille et limite ainsi l’exclusion. L’agriculture familiale est une véritable source de travail et de revenus pour les femmes. Selon la FAO, elles représentent 43% de la main-d’œuvre agricole dans les pays du Sud. Dans certaines sociétés encore fort marquées par l’empreinte patriarcale, l’agriculture familiale représente donc un potentiel pour les femmes : être actives, épanouies et plus indépendantes. Dans les faits, ce rôle considérable qu’elles jouent dans le développement économique et culturel des familles et des communautés paysannes est peu reconnu : elles ne jouissent pas des mêmes droits que les hommes, sont victimes de discriminations pour l’accès à la terre, aux crédits, à la formation, etc. et bénéficient rarement d’une reconnaissance de leur statut d’agricultrices, propriétaires ou copropriétaires agricoles, et de mères de famille qui veillent au bien-être de leur foyer.

L’agriculture familiale permet la perpétuation d’un mode de vie, elle participe au maintien des traditions et à l’identité culturelle du groupe. On y observe des liens de solidarité entre générations. Dans un monde qui s’urbanise et dans lequel les rapports familiaux évoluent, cette identité culturelle est importante car elle permet de prendre sa juste place dans le monde, en tant qu’individu et en tant que groupe humain.

Sources : 
- Coordination SUD. Solidarité Urgence Développement. Défendre les agricultures familiales : lesquelles ? pourquoi ? Résultats des travaux et du séminaire organisé par la Commission Agriculture et Alimentation de Coordination SUD, le 11 décembre 2007.
- FAO, La contribution des femmes à la production agricole et à la sécurité alimentaire : situation actuelle et perspectives, Rome.
- FIDA, Promouvoir l’accès des ruraux pauvres aux marchés pour réaliser les objectifs de développement du Millénaire. Document de synthèse, Rome, 2003.
- SOS Faim, « Agricultures familiales : au pluriel ! » in Défis Sud n° 116, janvier 2014, www.sosfaim.be

Nourrir les hommes

Le défi alimentaire

Chaque jour, on compte plus de 200 000 bouches supplémentaires à nourrir alors qu’une personne sur huit souffre déjà de la faim. En 2050, la population mondiale atteindra 10 milliards d’habitants. Pour relever ce défi, la production agricole alimentaire devrait augmenter de 70 %  à l’échelle mondiale (selon les projections de la FAO).

nourrir les hommes

La réponse de l’agriculture familiale

Malgré un soutien politique et financier minime, les 500 millions d’exploitations familiales actuelles produisent déjà plus de 80% de la nourriture dans le monde. Leur capacité à produire n’est plus à démontrer. Différentes études ont même prouvé qu’elles sont en mesure d’augmenter leur niveau de production, alors que la productivité des terres utilisées par l’agriculture industrielle décroit avec le temps. La plupart des recherches font état d’une relation inversement proportionnelle entre la taille de l’exploitation et la productivité. Si l’agriculture familiale demande bien davantage de main-d’œuvre que l’agriculture industrielle, son rendement à surface égale est quant à lui supérieur si on tient compte de l’apport nutritionnel et de son impact environnemental. En effet, l’agriculture familiale produit globalement une plus grande variété de denrées, garantes d’un meilleur équilibre alimentaire.

Enfin, les agriculteurs familiaux sont les gardiens d’un savoir-faire adapté aux écologies locales et aux capacités de la terre. Ils utilisent notamment des techniques de gestion des sols complexes et innovantes, permettant d’optimaliser les ressources naturelles et, par conséquent, la production. La résilience de l’agriculture familiale, c’est-à-dire sa capacité à s’adapter à un environnement changeant, constitue également une de ses forces. Loin de l’image archaïque que certains lui donnent, c’est une agriculture qui s’adapte continuellement aux évolutions du milieu.

Sources : 
- Coordination SUD. Solidarité Urgence Développement. Défendre les agricultures familiales : lesquelles ? pourquoi ? Résultats des travaux et du séminaire organisé par la Commission Agriculture et Alimentation de Coordination SUD, le 11 décembre 2007.
- Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Produire plus avec moins. Guide à l’intention des décideurs sur l’intensification durable de l’agriculture paysanne, Rome, 2011.
- SOS Faim, « Agricultures familiales : au pluriel ! » in Défis Sud n° 116, janvier 2014, www.sosfaim.be
- SOS Faim, « Comment les exploitations familiales peuvent-elles nourrir le Sénégal ? » in Dynamiques Paysannes n°24, 2011, www.sosfaim.be

Les paysans face à
des obstacles multiples

L’agriculture familiale peut nourrir le monde… pourtant 65% des personnes qui ont faim sont des agriculteurs familiaux ! Comment expliquer cet incroyable paradoxe ? Comme la majorité des agriculteurs familiaux, Saliou, Ndioufa et Yagouba doivent quotidiennement faire face à de nombreuses difficultés qui les empêchent de développer leur activité agricole.

Saliou, en quête d’eau

Comme la plupart des exploitants agricoles de la zone des Niayes, située à l’ouest du Sénégal, Saliou Sarr est maraîcher. Il dispose de 10 ha de terres pour produire du chou, de la tomate, du poivron, du piment, du concombre et du manioc. Le terrain dont il dispose est vaste mais sans accès direct à l’eau. Sa famille et lui doivent parcourir quotidiennement trois kilomètres pour recueillir l’eau à la source la plus proche et arroser leurs parcelles.

Saliou aimerait installer une motopompe et un système d’irrigation pour faciliter son travail, permettre à l’exploitation de produire des légumes pendant la saison sèche et donc augmenter ses revenus. Il s’agit d’un investissement important pour un petit producteur comme lui. Malheureusement, il ne bénéficie d’aucune aide ou subvention de l’État et ses maigres économies ne lui permettent pas de faire un tel achat. De plus, les banques ne font pas confiance aux petits producteurs qui, d’après elles, n’offrent pas assez de garanties. Elles ne veulent donc pas lui octroyer de crédit.

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Saliou Sarr allait renoncer à son projet quand il a entendu parler de la mutuelle d’épargne et crédit de l’UGPN. Cette organisation paysanne conseille les producteurs dans l’identification de leurs besoins et les soutient dans leurs projets d’investissements.

Pour savoir comment cette organisation a aidé Saliou, rendez-vous sur la page « Initiatives au Sud ».

Ndioufa : un laborieux combat pour garder ses terres familiales

Ndioufa habite le village de Koulouck Wolof, dans la région de Thiès au Sénégal. Depuis le décès de son mari, elle est devenue chef de l’exploitation familiale. Sur une superficie totale de 5 ha, la famille de Ndioufa produit du mil et de l’arachide. Depuis quelques années, elle consacre une partie de son terrain à la culture maraîchère, notamment pour la production de l’oignon.

L’exploitation produit suffisamment de céréales et de légumes pour nourrir toute la famille. Quand la récolte est abondante, elle vend une partie de ses oignons au marché local. Elle peut ainsi acheter d’autres vivres comme du riz et de l’huile mais aussi financer la scolarité de ses enfants et faire certains investissements.

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Dans la région de Thiès, comme ailleurs au Sénégal, la plupart des exploitations familiales ne disposent pas de titre foncier. La terre est généralement exploitée de génération en génération sans que celle-ci en soit officiellement propriétaire. Cela signifie que, du jour au lendemain, une famille peut se retrouver privée de sa terre sans pouvoir contester. C’est ce qui menaçait d’arriver à Nidoufa Sow. À la mort de son époux, sans titre de propriété, elle ne disposait d’aucun document officiel prouvant que son principal outil de travail, la terre, appartenait à sa famille.

Accompagnée par l’association Jig-Jam, elle a entamé une bataille pour obtenir le droit de poursuivre son activité sur les terres familiales. Jig-Jam réalise un travail de plaidoyer auprès des élus locaux afin qu’ils octroient des « délibérations », un document officiel qui sécurise les terres des paysans. Découvrez les résultats de leur plaidoyer pour sécuriser l’accès à sa terre ici.

Yagouba, un agriculteur-éleveur isolé

Yagouba est un jeune chef de famille. À 35 ans, il est à la tête de son exploitation agropastorale, située au nord du Sénégal, dans la réserve du Ferlo. Comme tous les Peuls, l’ethnie à laquelle il appartient, il ne dit jamais de combien de têtes son troupeau est composé. C’est tabou. Mais Yagouba détient de nombreux moutons, des chèvres et des vaches. Il se définit avant tout comme éleveur mais il est aussi agriculteur. Pour assurer la sécurité alimentaire de sa famille, il cultive du mil et de l’arachide pendant l’hivernage.

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Lorsque Yagouba s’est installé avec sa famille, il détenait un troupeau de petite taille et ses activités agricoles ne couvraient que la moitié des besoins alimentaires de sa famille. Utilisant des semences de mauvaise qualité, ses rendements étaient médiocres. Par ailleurs, dans cette zone aride, les éleveurs comme Yagouba doivent régulièrement parcourir des dizaines de kilomètres avec leurs troupeaux pour trouver des pâturages. Difficile dans ces conditions d’assurer la pérennisation du troupeau, de l’exploitation et donc de la famille.

Dans cette région isolée, où l’information peine à arriver et où la formation est quasiment inexistante, Yagouba ne voyait pas comment s’en sortir et songeait à abandonner son travail agricole pour rejoindre la ville. Puis il s’est vu proposer par l’EGAB, une organisation paysanne spécialisée dans l’élevage, un accompagnement pour tenter de développer son activité et être en mesure de nourrir sa famille.

Pour connaître les résultats du travail de suivi de cette organisation et savoir si Yagouba a finalement dû délaisser ses activités agricoles, regardez cette capsule vidéo.

Obstacles à l’agriculture familiale

Les agriculteurs familiaux font face à une série d’obstacles dans l’exercice quotidien de leur activité. Ces obstacles se présentent sous des degrés et des formes variées. Petit tour d’horizon, synthétique et non exhaustif, de ces difficultés rassemblées, ici, en quatre catégories.

  • Un facteur majeur affecte les agriculteurs : le manque de reconnaissance de leur métier et de valorisation de leurs produits. Au Nord comme au Sud, les agriculteurs ne sont pas reconnus pour le travail qu’ils réalisent et les services qu’ils rendent à la société. C’est encore pire en ce qui concerne les agricultrices. La course à l’urbanisation, l’industrialisation et le monde de la finance ont marginalisé le rôle de l’agriculteur dans la société. Résultat, les politiques liées à l’agriculture mais aussi à la recherche, à l’énergie, au commerce ou à la finance mettent l’agriculteur familial en difficulté, voire même l’anéantissent au profit d’autres intérêts.

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  • Le manque d’accès aux moyens de production se marque tout d’abord au niveau de l’accès à la terre. Sous la pression urbanistique, démographique, énergétique (avec la montée en puissance des agrocarburants) et la mainmise de l’agro-industrie, l’accès au foncier pour les petits agriculteurs est sans cesse menacé et chaque jour de plus en plus cher. Les accaparements de terres explosent et ciblent les éleveurs et les agriculteurs les plus vulnérables.L’accès aux ressources, c’est également l’accès au capital et au crédit.Or l’AF est peu soutenue par les pouvoirs publics, les subsides sont inexistants dans les pays les plus peuplés de paysans et les crédits sont chers et inadaptés. Quant à la microfinance, elle peine à se répandre en milieu rural, les taux pratiqués sont exorbitants et souvent inadaptés à la saisonnalité de l’activité agricole. L’adage ‘les banques ne prêtent qu’aux riches’ s’applique merveilleusement au monde agricole. Sans argent, l’AF du Sud est incapable d’investir dans son exploitation. Côté Nord, ce n’est pas l’accès au crédit mais la multiplication des crédits qui étrangle les agriculteurs familiaux.

    L’accès aux moyens de production, c’est aussi l’accès à des semences de qualité et adaptées aux réalités de la production. Or, la recherche et les lois de propriété intellectuelle ont noyauté tout le capital semencier, mettant l’agriculteur familial dans une situation de dépendance par rapport à l’industrie. Il en est de même de l’accès à des intrants de qualité (engrais), aux mains de quelques sociétés omnipotentes. L’outillage et la mécanisation adaptée, tout comme l’accès à l’eau, constituent d’autres combats des agriculteurs familiaux et de leurs syndicats, dans le souci d’optimaliser la production agricole et les rendements.

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  • Les changements climatiques sont déjà bien présents dans les zones entre les tropiques, soit les zones les plus pauvres et les plus rurales de la planète. Ils frappent d’ores et déjà les agriculteurs, à travers une pluviométrie irrégulière, des périodes de sécheresse accentuées et des catastrophes naturelles à répétition.
  • L’absence de prix rémunérateurs vient s’ajouter aux obstacles précédents. Il ne suffit pas à l’agriculteur d’arriver à produire, encore lui faut-il vendre à un prix qui permettra à sa famille de vivre de son activité. Or, l’agriculteur familial, sauf à vendre directement ses produits aux consommateurs et fixer un prix qui intégrera ses coûts de production réels, n’a plus aujourd’hui de pouvoir de négociation. Les prix d’une grande majorité des produits agricoles sont fixés par le marché mondial. Et ce prix ne reflète en rien les coûts de production réels des agriculteurs. Le prix mondial est le prix le plus bas, puisqu’il s’aligne sur les coûts de production les plus bas à l’échelle de la planète. Le prix mondial est aussi extrêmement volatile. Cette double tendance à la baisse et à la volatilité des prix vient du fait que les marchés agricoles ne sont plus régulés et organisés par les pouvoirs publics (on parle de dérégulation des marchés agricoles). Elle s’explique aussi par la forte financiarisation de l’agriculture (création d’une bourse des matières premières agricoles et, au sein des banques, de produits financiers spéculant sur l’alimentation qui influencent la fixation des prix des matières agricoles). L’agriculteur familial est devenu le maillon faible de la chaine agricole et peine à obtenir un revenu décent pour ses produits.
Sources :
- SOS Faim, Ensemble pour influencer les politiques – Document des plateformes paysannes d’Afrique de l’Ouest et des organisations de solidarité internationale, 2012, www.sosfaim.be
- SOS Faim, Répondre aux crises alimentaires de façon durable – Appuyer et soutenir les paysans et les paysannes, Document des plateformes paysannes d’Afrique de l’Ouest et des organisations de solidarité internationale, 2011, www.sosfaim.be

Zoom sur le Nord : des difficultés similaires

Les difficultés auxquelles doivent faire face nos agriculteurs sont en partie partagées par les autres agriculteurs de la planète, avec des nuances et des marges qui peuvent différer.

  • Coûts de production toujours plus élevés qui entrainent un endettement croissant : ces coûts sont liés à la mécanisation, l’accès à la terre, la modernisation des installations imposées par les réglementations sanitaires européennes, etc.
  • Prix volatiles et non rémunérateurs : les prix ne sont plus fixés par le régulateur mais par le marché. On constate une forte pression du commerce et de l’industrie pour faire baisser les prix dans un marché hyper concurrentiel où le pouvoir de négociation des producteurs est très faible.
  • Incertitude et imprévisibilité du métier dans un contexte où les politiques sont en permanente redéfinition. Par exemple, la politique agricole commune (PAC) de l’Union européenne est régulièrement revue.
  • Spéculation financière sur les matières premières agricoles : ces pratiques spéculatives sur le prix du blé, du riz ou encore du maïs en bourse entrainent une volatilité qui se répercute sur les prix du marché. Au moment où ils sèment, les agriculteurs ne savent donc jamais à quel prix ils vont pouvoir vendre leur récolte quelques mois plus tard.
  • Désintérêt de la jeunesse : de nos jours, la profession d’agriculteur est exigeante, jouit de peu de reconnaissance et nécessite des investissements financiers importants dès le départ.

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Sources : 
- FUGEA (Fédération Unie de Groupements d’Éleveurs et d’Agriculteurs), interview réalisée en septembre 2014, www.fugea.be
- Wijngaert Eric, éleveur et producteur dans la province du Hainaut, interview du 24 septembre 2014.

Les paysans en marche
vers leur développement

Face aux multiples obstacles, les agriculteurs du Sud se mobilisent pour trouver des solutions, faire entendre leurs voix et peser davantage dans la balance des négociations. Dans ces combats, ils sont accompagnés par des organisations paysannes.

Se transformer pour durer : l’agriculture familiale en chantier

Des défis au Sud…

Un préjugé tenace veut que l’agriculture familiale soit figée, archaïque et refuse d’évoluer. Derrière ce trait forcé, la réalité démontre au contraire que l’agriculture familiale témoigne d’un dynamisme social et économique et d’une volonté d’évoluer et de se moderniser.

Pour répondre aux défis majeurs de la société, cette modernisation se décline sur différents plans, complémentaires :

  • au niveau technique : mécanisation, semences adaptées, équipements adéquats et performants des exploitations familiales.
  • au niveau de la gestion : les exploitations familiales doivent être administrées comme des entreprises économiques viables et modernes. Les décisions de gestion doivent se prendre au sein de la cellule familiale – on parle ainsi d’assemblée de famille au Sénégal, par exemple – qui implique les femmes et les jeunes dans les processus de décision. Car l’agriculture familiale doit garantir une égalité de droits entre les hommes et les femmes, les vieux et les jeunes.
  • au niveau commercial, les exploitations doivent être en mesure d’accéder, dans de bonnes conditions, aux marchés locaux, nationaux et régionaux.
  • au niveau de l’accès aux connaissances et de la formation : l’agriculture familiale est un métier et les membres de la famille sont tenus de se former en permanence, via leurs pairs ou des experts pour adapter leurs pratiques à leur contexte, dans un souci de permanence et de durabilité de la famille.
  • au niveau agronomique : l’agriculture familiale doit opérer une transition agroécologique. Pour ce faire, elle doit progressivement exclure tout recours à des traitements chimiques au profit de modes de production plus durables.

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Cette modernisation des exploitations familiales, réclamée par les organisations paysannes du Sud, et leurs membres, est une condition pour redonner confiance aux jeunes dans la rentabilité des exploitations. La comparaison avec le mode de vie dans les autres secteurs tend à décourager les jeunes, ceci se vérifie tant au Nord qu’au Sud. Seule une modernisation de l’agriculture familiale, bien pensée et planifiée avec les organisations paysannes, pourra en faire un levier dans la lutte contre la faim et la pauvreté pour un développement durable.

Enfin, cette transformation passe aussi par une structuration forte des organisations paysannes qui les représentent : le rôle des organisations paysannes est central dans la modernisation des exploitations familiales. Ce sont elles qui vont pouvoir fournir les services à leurs membres en vue d’une modernisation adaptée et adéquate. Moderniser l’exploitation familiale ne veut pas dire qu’il faut faire un copier-coller de l’agriculture pratiquée dans les pays industrialisés, mais qu’il faut faire évoluer l’agriculture familiale pour qu’elle soit en mesure de répondre aux défis actuels de la société (alimentaire, socio-économique et environnemental).

… Mais aussi au Nord

Généralement déjà bien modernisée, l’agriculture familiale chez nous doit aussi évoluer pour rester un secteur professionnel rentable et susciter la relève générationnelle.

Les agriculteurs familiaux de type conventionnel, compte tenu des obstacles auxquels ils font face (prix de revient volatiles, hausse des coûts de production non maitrisés…), voient souvent leur rentabilité diminuer et sont amenés à faire un choix. Ils doivent grandir et poursuivre la spirale de l’endettement ou abandonner.

La seule alternative, c’est sortir de la dépendance en acquérant davantage d’autonomie via :

  • la production des intrants au sein de la ferme : engrais organique, production de semences, d’énergie…
  • la commercialisation des produits via des coopératives et des circuits courts

« La vente directe c’est notre seul salut pour demain. Dans 10 ans, il va rester des petits agriculteurs qui font de la vente directe, et quelques gros agriculteurs qui alimentent l’agro-industrie, et sont hyper endettés »
Eric Wijngaert, agriculteur wallon

Cette évolution appartient au secteur agricole lui-même mais elle s’imposera avec l’évolution des comportements de consommation et un environnement politique favorable (voir l’encadré à ce sujet).

Sources :
- De Neuville Marc, « L’agriculture familiale en cinq revendications », in Le Sillon belge, 18 avril 2014.
- FUGEA (Fédération Unie de Groupements d’Éleveurs et d’Agriculteurs), interview réalisée en septembre 2014, www.fugea.be
- Wijngaert Eric, éleveur et producteur dans la province du Hainaut, interview du 24 septembre 2014.

Des changements politiques indispensables

Les principaux obstacles auxquels les agriculteurs familiaux doivent faire face sont le résultat de décisions politiques qui leur sont défavorables. Seule l’adoption de politiques volontaristes en faveur de l’agriculture familiale au niveau local, national et international lui permettra de développer tout son potentiel. Cela passe en priorité par des politiques dans le secteur agricole, mais aussi dans les domaines commercial, énergétique, climatique, financier, celui du foncier et de la fiscalité.

Au niveau des politiques agricoles : partout dans le monde où vivent des paysans, il est indispensable d’adopter des mesures de soutien à l’agriculture de type familiale, sinon l’agriculture de type industriel l’emportera nécessairement sur le court terme grâce à des prix plus compétitifs (car ils n’intègrent pas les coûts sociaux, environnementaux, etc.). Ces politiques agricoles doivent se situer principalement au niveau de :

  • la gestion de l’offre de produits agricoles : constitution de stocks de réserve, fixation de quotas (quantités maximum), etc.
  • des prix : fixation de prix minimum en fonction de la réalité du prix de revient et des coûts de production
  • des aides : primes plus importantes pour les exploitations de petite taille, accès aux crédits agricoles à des taux intéressants, etc.

En lien avec les politiques agricoles, il est essentiel de révolutionner les politiques de commerce international, régional et local. À contre-courant du diktat néolibéral, il faut :

  • une régulation des produits importés (via, par exemple, une interdiction d’importer certains produits agricoles concurrents aux produits locaux ou la fixation de quotas maximum de produits concurrents étrangers)
  • une libre circulation des produits de l’agriculture familiale au sein des régions afin de favoriser les synergies entre les agricultures familiales d’une même zone.

Cela nécessite :

  • une révision des règles de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), des organisations paysannes plaident d’ailleurs pour la sortie de l’agriculture de l’OMC
  • une révision des accords bilatéraux de libre-échange qui devraient adopter le principe de l’exception agricole. Ce principe permettrait que les produits agricoles puissent encore faire l’objet de protection aux importations. Au niveau national, cela implique des mesures favorables à la vente directe et aux circuits courts.

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Sur le plan national, les gouvernements doivent adopter des lois foncières qui sécurisent l’accès à la terre en faveur des agriculteurs familiaux (obtention de titres de propriété foncière) et freinent les accaparements de terre (limiter l’acquisition de grandes surfaces par les investisseurs privés ou publics, fixer des conditions de compensation aux paysans expropriés, etc.). Ils doivent également adopter une réglementation fiscale et financière qui encourage l’accès aux moyens de production nécessaires aux agriculteurs familiaux (semences, engrais, mécanisation, etc.), à travers des taux de crédit et de taxation adaptés et qui favorisent la commercialisation des produits issus de l’agriculture familiale.

Sur le plan international, il est aussi nécessaire de freiner la financiarisation de l’agriculture, et tout particulièrement les mouvements spéculatifs sur les matières premières agricoles qui rendent les prix extrêmement volatiles.

Des mesures doivent également être prises au niveau des politiques climatiques, avec des engagements fermes et contraignants de la communauté internationale pour soutenir durablement l’adaptation des agriculteurs familiaux aux changements climatiques déjà très présents dans les régions les plus pauvres largement peuplées d’agriculteurs et éleveurs familiaux.

Sources :
- SOS Faim, Ensemble pour influencer les politiques – Document des plateformes paysannes d’Afrique de l’Ouest et des organisations de solidarité internationale, 2012, www.sosfaim.be
- SOS Faim, Répondre aux crises alimentaires de façon durable – Appuyer et soutenir les paysans et les paysannes, Document des plateformes paysannes d’Afrique de l’Ouest et des organisations de solidarité internationale, 2011, www.sosfaim.be

Soutenir l’agriculture familiale :
3 pistes d’action pour agir au Nord

Pour développer toutes ses potentialités, l’agriculture familiale a besoin, avant tout, d’être soutenue politiquement. Mais cela ne signifie pas que nous pouvons rester les bras croisés ! Dans notre monde interconnecté, un engagement des citoyens au Nord est nécessaire.

Soutenir financièrement les paysans du Sud

Comme vous avez pu le découvrir, les organisations paysannes et les agriculteurs ne manquent pas de projets, d’idées et de dynamisme… par contre, ils manquent cruellement de moyens pour les mettre en place.

Une manière de les soutenir, c’est de faire un don d’argent. Pas besoin d’être riche pour faire un don, même les petites sommes sont utiles et puis, comme on dit, « Les petites gouttes d’eau font les grandes rivières ».

À qui donner de l’argent ?

Notre proposition est de faire un don à une organisation internationale qui travaille en partenariat avec des organisations locales. De cette manière, votre argent est utilisé dans un cadre sûr : des chartes sont établies entre les partenaires afin que l’argent soit affecté à des projets précis et des évaluations sont faites régulièrement.

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SOS Faim vous propose de jouer l’intermédiaire : l’argent que l’ONG récolte en Belgique est réparti entre ses partenaires en Afrique et en Amérique latine. Au total, plus d’une cinquantaine d’organisations locales et régionales bénéficient de notre soutien financier. Cet argent permet à ces organisations de développer des projets et offrir des services aux agriculteurs directement sur le terrain tels que des formations, des accès facilités à des crédits, des partages d’expériences, des accompagnements pour défendre leurs terres, etc. Pour en savoir plus sur leurs actions, consultez notre site.

Faire un don à SOS Faim, c’est un acte simple et utile pour soutenir les agriculteurs du Sud et lutter contre la faim dans le monde. Vous êtes convaincus ? Rendez-vous ici pour concrétiser votre envie. Et si vous avez encore des doutes ou des questions, n’hésitez pas à nous contacter par e-mail ou par téléphone au 02/548 06 70.

S’informer et se mobiliser

Nous vivons dans un pays où nous avons toute la liberté de nous renseigner, diffuser des informations, exprimer notre opinion sans risque… En tant que citoyens, nous avons la possibilité d’interpeller nos représentants politiques afin de les encourager à prendre des mesures favorisant le développement de l’agriculture familiale au Nord comme au Sud mais aussi, et surtout, à ne pas voter des lois et des accords qui ont des répercussions négatives sur les agriculteurs dans les pays du Sud.

Les décisions prises au Nord ont un impact sur le Sud

La mondialisation a favorisé ce genre de situations. En voici deux exemples parlants :

  • L’agriculture européenne est largement subventionnée, à travers une série d’aides prévues dans la PAC (Politique agricole commune). Résultat : certaines productions excédentaires sont exportées par les opérateurs économiques sur les marchés africains à un prix défiant toute concurrence, ce qui fragilise les producteurs locaux. C’est le cas du lait (en poudre) au Burkina Faso, des oignons au Sénégal, etc.
  • L’Union européenne impose l’utilisation d’agrocarburants afin de rouler plus « vert ». Résultat : de nombreuses terres agricoles en Amérique latine sont destinées à la production de cultures (tournesol, soja, etc.) qui finiront dans nos moteurs alors qu’elles pourraient produire de quoi nourrir la population locale.

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Mon avis a aussi un impact !

Nous élisons des décideurs politiques pour défendre nos intérêts, il est donc de leur devoir de nous écouter. Voici différentes pistes pour exprimer notre mécontentement ou partager nos propositions :

  • signer des pétitions qui renforceront le travail de diverses organisations qui font du lobbying (plaidoyer politique)
  • manifester dans la rue et participer à des événements/actions de mobilisation
  • intégrer des réseaux citoyens et des associations en tant que bénévole
  • relayer des informations afin de sensibiliser un maximum de personnes
  • participer à des processus et instances de décisions au niveau local, au sein de votre commune, d’une antenne d’un parti politique, etc.

SOS Faim mène une multitude de projets et d’activités en Belgique et en Europe à ce niveau. Retrouvez-les sur notre site et, pourquoi pas, rejoignez notre réseau de bénévoles : www.sosfaim.be

Consommer autrement

En tant que consommateurs, nous décidons de ce que nous achetons et mangeons. Libre à nous de favoriser certains produits et circuits de production/distribution que nous trouvons plus respectueux des hommes et de l’environnement.

  • Adopter des pratiques de consommation « durables » : manger des produits locaux et de saison, réduire sa consommation de viande et de produits d’origine animale, éviter le gaspillage, etc.
  • Favoriser des circuits de distribution courts pour limiter le nombre d’intermédiaires et s’assurer que le producteur reçoive un prix juste : traiter directement avec des agriculteurs près de chez soi, passer par un groupe d’achats communs (GAC ou GASAP), faire ses courses dans les commerces qui s’approvisionnent directement auprès des producteurs locaux ou produisent eux-mêmes (boulangerie, boucherie, épicerie), etc.
  • Acheter des produits issus du commerce équitable, surtout s’ils ne peuvent pas être produits près de chez nous (café, thé, riz…), afin que les producteurs soient rémunérés justement.
  • Se renseigner sur l’origine des produits et privilégier des produits issus de l’agriculture paysanne : par quelle société est-il vendu ? quelle est sa politique en matière de conditions de travail et de respect de l’environnement ? dans quel pays/contexte a-t-il été produit ?

consommer autrement

Nous disposons aussi, en tant que destinataires finaux de la chaine alimentaire, d’un certain pouvoir pour faire pression sur les acteurs qui nous les vendent. Les produits doivent répondre à nos attentes et satisfaire nos besoins, sans quoi nous ne les achèterons pas. Nous pouvons donc exiger certaines conditions ou boycotter certains produits ou entreprises qui ne correspondent pas à nos valeurs.

Pour tout savoir sur l’alimentation durable, rendez-vous sur le site du RABAD, dont SOS Faim est membre.